Joie de l’espérance
« Voilà combien de jours, voilà combien de nuits… / Voilà combien de temps que tu es reparti ! […] / Dis ! Quand reviendras-tu ? Dis ! au moins le sais-tu ? » Ne cherchez pas, ce n’est pas dans la Bible. Les mots de la chanson de Barbara devraient nous rejoindre particulièrement en ce temps d’Avent, en ce temps où nous ravivons notre désir que le Christ revienne enfin.
Au long des années, et au vu des difficultés que traverse notre monde, il est normal que notre attente se fasse parfois douloureuse, et même révoltée ; c’est bien le signe qu’elle est authentique. « Reviens, Seigneur ! Pourquoi tarder ? »
Et il viendra, nous en sommes sûrs. Tout à l’heure, prêtons bien attention aux paroles de la préface : le Seigneur Jésus est déjà venu il y a 2000 ans, et « il viendra de nouveau, revêtu de sa gloire, afin que nous possédions dans la pleine lumière les biens que [Dieu] nous a promis et que nous attendons en veillant dans la foi. »
Cette espérance du retour du Christ est pour nous la source de la vraie joie. C’est elle, la joie de l’espérance, qui est à l’honneur en ce troisième dimanche. Le violet de l’Avent se colore déjà de la lumière de Noël, d’où la couleur rose des ornements.
La joie de l’espérance… et pourtant il m’arrive moi aussi de me trouver dans la situation de Jean le Baptiste. Pour lui, pour moi, pour vous, les épreuves sont parfois si lourdes que la joie de l’espérance en est menacée. À la lecture des textes de ce dimanche, je voudrais nous proposer trois points de méditation pour raviver la joie de l’espérance.
Le premier point nous est donné par Jésus dans l’Évangile. Aux envoyés de Jean le Baptiste, il demande d’abord de regarder ce qui est sous leurs yeux. Le salut de Dieu est vraiment à l’œuvre aujourd’hui. Dimanche dernier, une personne m’a raconté les merveilles qui avaient eu lieu récemment dans sa vie : des guérisons étonnantes, des réconciliations inattendues, des conversions inespérées. J’espère qu’il nous arrive nous aussi de discerner le Royaume à l’œuvre ici et aujourd’hui.
Premier point donc : apprenons à reconnaître que le Seigneur est vivant et agissant ici et maintenant.
Voici le deuxième point : apprenons à voir le Seigneur à l’œuvre y compris dans les épreuves et les contradictions. Les voies de Dieu ne sont pas les nôtres : c’est dans l’impuissance du Crucifié, de Jésus mort et enseveli, qu’éclate la puissance du salut. Il en est souvent de même dans nos vies : le salut passe à travers nos failles, nos fragilités, nos souffrances et nos échecs.
Nos épreuves de santé nous obligent à moins compter sur nos propres forces. Il y a un temps pour se retrousser les manches et servir ; il y a aussi un temps pour se laisser faire, un temps où nous acceptons de ne pas tout maîtriser, un temps qui nous prépare au grand lâcher-prise qui débouchera sur la rencontre avec le Seigneur. Nos épreuves de santé peuvent aussi être des lieux de salut.
Nos échecs aussi sont des lieux de salut. Regardez Jean le Baptiste : il savait qu’il était le Précurseur du Seigneur. Peut-être s’attendait-il à remettre au Seigneur les clés d’un monde tout prêt à le recevoir : « Et voilà, Seigneur ! Regarde : j’ai tout préparé pour ta venue. » Et voilà que rien ne se passe comme il l’avait prévu. Il peut nous arriver nous aussi d’échouer, y compris dans un beau projet au service de Dieu et des autres. Nous voudrions bien – et moi le premier – arriver au Ciel avec nos mains pleines, disant au Seigneur : « Regarde tout ce que j’ai fait pour toi ! Je peux entrer maintenant ? » Au contraire, c’est lui qui nous montrera ses mains, ses pieds, son côté, son cœur, en nous disant : « Regarde tout ce que j’ai fait pour toi ! Allez, entre ! »
Deuxième point donc : apprenons à reconnaître le Seigneur à l’œuvre dans nos épreuves. C’est là qu’il nous prépare à le rencontrer.
En dernier lieu, lorsque nous sommes désemparés parce que Dieu ne répond pas à nos appels, rappelons-nous que c’est dans le silence et dans la nuit que le Seigneur accomplit ses œuvres les plus grandes.
Dans la deuxième lecture, l’apôtre Jacques nous demande de prendre « pour modèles d’endurance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. »
Prenons exemple sur la patience d’Abraham qui a continué à faire confiance à la promesse que le Seigneur lui avait faite : ta descendance sera plus nombreuse que les étoiles du ciel. Prenons exemple sur la patience de Moïse qui a tenu bon dans les épreuves parce qu’il était sûr que le Seigneur conduirait son peuple dans la Terre Promise.
Prenons aussi exemple sur Isaïe : c’est justement au cœur d’une situation politique des plus désespérées que le prophète formule un oracle d’espérance : « On verra la gloire du Seigneur, la splendeur de notre Dieu. Fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent : “Soyez forts, ne craignez pas. Voici votre Dieu.” »
Dans l’Évangile de l’Annonciation, l’ange dit à Marie que la puissance du Très-Haut la prendra sous son ombre pour accomplir la merveille des merveilles, l’Incarnation du Verbe de Dieu. Peut-être que l’un ou l’autre ici se sent dans la nuit. Cette nuit est peut-être justement l’ombre de la puissance du Très-Haut. Courage donc !
Frères et sœurs, ne laissons pas le découragement nous voler la joie de l’espérance. Ouvrons les yeux de la foi sur le monde qui nous entoure. Soyez forts, prenez courage, vous tous qui espérez le Seigneur !
Alexandre-Marie Valder