Aujourd’hui, le Christ est baptisé dans le Jourdain pour notre salut.

Aujourd’hui, le Christ est baptisé dans le Jourdain pour notre salut.

Le Jourdain, c’est notre cœur. Comme les eaux du Jourdain irriguent et fertilisent la terre et lui font porter du fruit, de même notre cœur physique irrigue notre corps entier, de même notre cœur spirituel est le lieu d’où sortent nos pensées, nos désirs, nos décisions. C’est du dedans, du cœur de l’homme, que viennent les pensées. Les bonnes, qui nous édifient et édifient les autres, qui nous rendent meilleurs, et aussi les mauvaises, qui nous flétrissent et nous abîment.

Puisque notre cœur est si important, c’est lui qu’il faut guérir. C’est à lui que Dieu s’adresse : « Parlez au cœur de Jérusalem », dit le prophète Isaïe. Dieu parle au cœur et non pas à l’extérieur. Il ne s’agit pas de nous donner des apparences de chrétiens sans reproche, mais de nous convertir profondément. Inversement, si nous sommes vraiment convertis, cela devrait transparaître dans notre manière de vivre.

Parler au cœur de Jérusalem, c’est justement la mission de Jean le Baptiste, envoyé pour faire revenir les Juifs au cœur, à l’essentiel, aux origines de leur histoire, lorsque le peuple délivré par le Seigneur est entré en terre promise en franchissant le Jourdain. Lorsque nous avons perdu notre route, le mieux à faire est de revenir en arrière jusqu’au carrefour et, de là, de reprendre le bon chemin. C’est ce que font les hommes et les femmes qui viennent voir Jean le Baptiste : ils reviennent aux origines, là où tout a commencé, ils traversent à nouveau le Jourdain pour repartir à neuf.

Aujourd’hui encore retentit l’appel de Jean le Baptiste : « Revenons à l’essentiel, revenons à notre cœur ! »

Le Jourdain est parfois bien boueux, et notre cœur parfois bien trouble. Ayons le courage de le reconnaître : nous ne sommes pas des champions de l’amour. Très souvent, trop souvent, nous faisons passer notre intérêt avant celui des autres, nous laissons Dieu de côté. Nous admirons les personnes bienveillantes, patientes, dévouées et généreuses, mais nous nous voyons bien souvent envieux, colériques et égoïstes.

Si notre cœur est blessé, bonne nouvelle : Jésus vient aujourd’hui pour guérir les cœurs blessés. Lui, Jésus n’a pas besoin de conversion, il n’a pas besoin de revenir à l’origine pour reprendre le bon chemin : il EST le chemin. Si Jésus vient pour être plongé dans le Jourdain, c’est pour que le Jourdain lui-même soit lavé.

Aujourd’hui, si nous le voulons bien, Jésus vient plonger dans notre cœur. Il vient par sa parole, par son corps livré pour nous que nous recevrons tout à l’heure. Voulons-nous le recevoir ?

Lorsque Jésus remonte du Jourdain, la voix du Père retentit : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »

Et nous, est-ce que nous trouvons notre joie en Dieu ? Ce n’est pas un hasard si une bonne partie des textes écrits par le pape François au cours de son pontificat abordent le thème de la joie : « La joie de l’Évangile », « Loué sois-tu ! », « La joie de l’amour », « Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse ».

Notre amitié avec Jésus est d’abord une affaire de joie. Lui-même n’a-t-il pas débuté son enseignement par ce discours bien connu : « Heureux les pauvres de cœur… heureux ceux qui pleurent… heureux les doux etc. » ? Si nous prenons vraiment au sérieux la question de Dieu, lui-même nous promet la joie. Le journaliste Nicolas Diat a publié en 2020 un beau livre intitulé « Le grand bonheur », décrivant la vie des moines de Fontgombault. Comment mieux dire que vivre pour Dieu rend heureux ?

Vivre pour Dieu, qu’est-ce que cela veut dire ? Il ne s’agit pas de devenir tous moines, de devenir des gens sérieux et fermés. Il s’agit, comme le dit saint Paul, de vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété. Vivre dans le temps présent, comme des hommes et des femmes d’aujourd’hui, sans se distinguer par notre vêtement ou notre alimentation, mais par une  manière de vivre sage, avec justice et piété.

La justice, c’est toujours donner à ceux qui nous entourent ce qui leur revient, et ce dont ils ont besoin. A nos parents, le respect. Aux pauvres, la miséricorde. A ceux qui se trompent, la vérité. A ceux qui nous blessent, le pardon. A tout homme, l’amour dû à un enfant bien-aimé de Dieu. Sans oublier de nous aimer nous-même.

La piété, c’est de toujours mettre Dieu à la première place. Donner du temps à Dieu dans la prière, chaque jour. Nous nourrir de sa Parole dans la Bible. Ne manquer volontairement aucune occasion de participer à la messe. Faire toute chose sous le regard de Dieu qui nous dit : « Tu es mon fils bien-aimé. »

Donner à chacun ce qu’il lui faut et donner la première place à Dieu…

Mais, me direz-vous, c’est beaucoup trop difficile… Cela demande un effort, en effet, comme tout ce qui est beau et grand, comme tout ce qui a du prix. Tout le monde n’a pas le courage de faire cet effort, mais je vous promets, à la suite de si nombreux témoins du Christ, qu’il en vaut largement la peine.

Alexandre-Marie prêtre