Faire miséricorde à nos défunts
Faire miséricorde à nos défunts
Frères et sœurs, le magistère du pape François a mis l’accent sur la miséricorde. Pensons au jubilé extraordinaire de la miséricorde célébré en 2016 et à l’encyclique Dilexit nos (« il nous a aimés ») consacrée à l’amour humain et divin du Cœur du Christ. C’est aussi le pape François qui avait initié la préparation de la récente exhortation apostolique Dilexi te (« je t’ai aimé ») du pape Léon consacrée à l’amour des pauvres.
Les quatorze œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle sont au cœur de la manière chrétienne d’être au monde. En ce jour de commémoration de tous les fidèles défunts, je veux insister sur deux d’entre elles : ensevelir les morts et prier pour eux.
Lorsqu’un de nos proches meurt, son corps est confié à nos soins et à notre miséricorde. Un corps dont aucun homme, aucune femme, ne prend soin est un corps abandonné. Au contraire, parce que nous sommes humains et parce que nous sommes chrétiens, nous entourons de soins le corps de nos morts, ce corps dont nous affirmons qu’il ressuscitera dans la gloire. Lorsque c’est possible, nous veillons le corps et nous le visitons. Au cours de la célébration des funérailles, nous entourons ce corps de signes d’espérance : les fleurs, la croix, la lumière pascale, l’encens, l’eau du baptême. Enfin, nous déposons le corps ou les cendres dans un lieu de mémoire.
Lorsqu’un de nos proches meurt, son âme aussi est confiée à nos soins et à notre miséricorde. Parce que nous sommes chrétiens et que nous attendons la réalisation des promesses du Christ, nous ne devrions pas abandonner les âmes de nos proches sans nous en occuper. Sommes-nous bien conscients de cela ?
Chaque année, le 2 novembre, nous prions pour tous nos frères et sœurs défunts, accomplissant ainsi une authentique œuvre de miséricorde à leur égard. Nous n’abandonnons ni leurs corps que nous avons ensevelis et que nous allons visiter au cimetière, ni leurs âmes pour lesquelles nous offrons des prières et des suffrages. Il existe un jour dans l’année qui nous rappelle de faire miséricorde à nos frères et sœurs tout au long de l’année.
Un jour, le Seigneur Jésus a résumé en une phrase ce que le Père du Ciel demande à ses enfants : « Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi. » (Mt 7,12) Et moi, qu’est-ce que je voudrais que les autres fassent pour moi lorsque je ne serai plus de ce monde ?
Instruit par l’enseignement du Seigneur Jésus, je sais qu’un jour ma vie apparaîtra en pleine lumière devant Dieu et devant mes frères et sœurs qui sont au Ciel auprès de Dieu.
Je sais qu’il existe la possibilité que je choisisse de fuir cette lumière, ce regard d’amour et de vérité porté sur ma vie ; que je refuse de me laisser aimer sans l’avoir mérité, de me laisser pardonner au-delà de l’imaginable ; que je préfère m’enfermer en moi-même, loin de mon Père et de mes frères et sœurs. Avec la grâce de Dieu, j’espère avoir le cœur assez humble, assez simple et assez confiant pour ne pas faire ce choix terrible.
Je sais qu’il existe également la possibilité que je sois déjà totalement transparent à la lumière de Dieu, le cœur et les bras largement ouverts au prochain, déjà tout endimanché pour les noces de l’Agneau. Rien n’est impossible à Dieu, certes, mais vous et moi sommes bien placés pour voir que j’en suis encore très loin.
Mon expérience, qui est sans doute partagée par un grand nombre ici, est plutôt que, chez l’immense majorité des personnes, la pureté originelle subsiste au fond du cœur, mais recouverte, envasée, encrassée par les petits et les grands compromis avec le mal que nous avons faits au long de nos jours. C’est cette expérience qui nous fait prier au début de chaque messe : « Oui, j’ai vraiment péché, c’est pourquoi je supplie la bienheureuse Vierge Marie, les anges et tous les saints, et vous aussi, frères et sœurs, de prier pour moi le Seigneur notre Dieu. »
« Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi. » Lorsque je serai mort, je voudrais que l’on ne me prenne pas pour plus saint que je ne suis. « Oh, il est allé au Ciel, comme tout le monde d’ailleurs. Il n’a pas besoin de nos prières. » Lorsque je serai mort, je voudrais que l’on prenne soin de mon corps et de mon âme, qu’il y ait des frères et sœurs qui prient pour moi le Seigneur notre Dieu.
Frères et sœurs, en ce jour de commémoration de tous les fidèles défunts, mais aussi tout au long de cette année, faisons miséricorde à ceux qui nous supplient de prier pour eux le Seigneur notre Dieu. Prions pour eux le psaume 129, « Des profondeurs, je crie vers toi, Seigneur » ; prions pour eux le chapelet ; faisons célébrer des messes pour eux ; faisons-leur cette miséricorde.
« Heureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde. » Amen.
Père Alexandre-Marie Valder