Je suis là pour toi.
« Vous ferez cela en mémoire de moi. » C’est ce que le Seigneur Jésus a dit aux apôtres le soir du dernier repas, la veille de sa mort sur la croix. À chaque eucharistie, le temps est comme concentré. Le passé est rendu présent, le futur est anticipé.
Tournons-nous d’abord vers le passé.
« Souviens-toi de la longue marche dans le désert, nous redisait Moïse il y a un instant. N’oublie pas le Seigneur ton Dieu. » Comme le peuple d’Israël cheminant dans le désert, nous sommes sous la main de Dieu. Le Seigneur prend soin de toute personne comme si elle était seule au monde. Il se fait présence attentive, tendresse, sollicitude pour chacun. La marche au désert a permis au peuple d’expérimenter concrètement cette prévenance du Seigneur qui l’a gardé des dangers et lui a permis de traverser le désert et de parvenir à la terre promise.
Mieux encore, le livre du Deutéronome nous dit que le Seigneur prend l’être humain au sérieux. La marche au désert est une image de la vie humaine. C’est une école où l’on apprend à marcher avec le Seigneur, où l’on reconquiert peu à peu sa liberté en se détachant de tout ce qui nous entrave. Ce n’est pas une tâche aisée, toutefois nous sommes sûrs que le Seigneur est présent à chaque étape pour nous éclairer, nous fortifier et nous libérer.
Toujours en regardant vers le passé, l’eucharistie nous ramène au pied de la croix de Jésus. Elle nous rend contemporains de l’offrande totale de sa vie à son Père en faveur de toute personne : « Ceci est mon corps livré pour vous… ceci est mon sang versé pour vous. » Tout disciple de Jésus peut faire sienne la parole émerveillée de saint Paul : « Il m’a aimé et s’est livré pour moi. »
Cette certitude de foi tourne dès à présent nos regards vers l’avenir : « Nous attendons ta venue dans la gloire… nous serons libérés de tout péché, à l’abri de toute épreuve… nous attendons cette bienheureuse espérance : l’avènement de Jésus-Christ notre Sauveur. »
Dieu s’est montré fidèle tout au long de l’histoire des hommes. Au commencement du monde, il a donné la vie à tous les êtres vivants, et spécialement aux humains. Il a multiplié les alliances avec eux, il a gardé sa fidélité à Abraham et à sa descendance, il a envoyé son propre Fils afin que tout homme, toute femme, puisse recevoir la vie éternelle. Comment Dieu laisserait-il disparaître dans le néant ceux qu’il a créés, libérés, soutenus, éduqués avec tant de patience, de fidélité et de tendresse ?
Les quarante ans du peuple d’Israël au désert sont une image de notre vie. Nous cheminons sous la main de Dieu vers la véritable terre promise, c’est-à-dire le Ciel. « Qui que tu sois donc, qui te hâtes vers la patrie céleste… sous la protection de Dieu, tu parviendras. »
Chaque jour, dans l’eucharistie, le Seigneur se rend présent pour nous et se donne à nous, comme pour nous redire : « Je suis là, présent à tes côtés aujourd’hui. J’étais déjà là pour toi hier. Je serai encore là pour toi demain, chaque jour de ta vie, et jusque dans la vie éternelle. »
À ce stade, je voudrais attirer notre attention sur une évidence : le Seigneur se donne à nous comme nourriture et boisson, « Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson, disait Jésus. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi je demeure en lui. »
Le Seigneur se donne à nous comme nourriture et boisson et il nous pose à chacun la question : « As-tu faim ? As-tu soif ? », et même plus précisément : « As-tu faim et soif de moi, ou bien as-tu trouvé ton contentement ailleurs qu’en moi ? »
Trouver notre contentement ailleurs que dans le Seigneur Jésus est une tentation qui nous menace tous. Certains se réfugient dans la nourriture et la boisson, d’autres dans les réseaux sociaux qui nous enferment dans une multitude de relations superficielles et nous coupent de notre être profond, d’autres encore dans des passions dévorantes qui les rendent esclaves.
« L’homme ne vit pas seulement de pain. » Au plus profond, ce qui nous fait vraiment vivre, ce n’est ni la nourriture, ni les relations virtuelles, ni le sport, ni le travail, mais l’amour puissant, fidèle et éternel qui ne se trouve qu’en Dieu seul. En se donnant à nous comme nourriture et boisson, le Seigneur Jésus nous invite à avoir faim de lui, à lui faire de la place dans ta vie, dans tes pensées, dans ton emploi du temps.
« De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. » En se donnant à nous comme nourriture et boisson, le Seigneur Jésus nous montre enfin ce que signifie « vivre par lui ». « Vivre par lui », c’est devenir soi-même nourriture et boisson pour le prochain, par l’attention que nous lui prêtons, par le soin que nous avons de lui, de la manière la plus concrète qui soit : partager son pain avec l’affamé, couvrir celui qui est nu, accueillir le pauvre, libérer l’opprimé.
En cette fête du Saint-Sacrement, le Seigneur nous redit : « Je suis là, présent à tes côtés aujourd’hui. J’étais déjà là pour toi hier. Je serai encore là pour toi demain, chaque jour de ta vie, et jusque dans la vie éternelle. Veux-tu venir à moi, afin d’avoir la vie ?
Alexandre-Marie Valder