L’espérance ne déçoit pas car le Seigneur ne déçoit pas

L’espérance ne déçoit pas car le Seigneur ne déçoit pas
« Le Seigneur dit à Moïse : “Passe devant le peuple, emmène avec toi plusieurs des anciens d’Israël, prends en main le bâton avec lequel tu as frappé le Nil, et va ! Moi, je serai là, devant toi, sur le rocher du mont Horeb. Tu frapperas le rocher, il en sortira de l’eau, et le peuple boira ! ” »
En réponse aux plaintes du peuple dans le désert, le Seigneur envoie Moïse en avant du peuple et lui fait cette promesse : « Moi, je serai là, devant toi. » Tout disciple du Seigneur, tout baptisé, participe à la mission prophétique de l’Eglise. Le regard de la foi et l’élan de l’espérance le portent en avant du peuple. Quelle tristesse lorsque des chrétiens négligent cette grâce du discernement évangélique et se contentent de hurler avec les loups, à la remorque de slogans simplistes !
Moïse est envoyé en avant du peuple, muni du bâton avec lequel il a frappé le Nil, ce même bâton qui s’était changé en serpent devant le trône de Pharaon. Ce bâton est le symbole de l’assistance du Seigneur, qui a montré son amour et sa puissance pour libérer son peuple. S’appuyer sur ce bâton, c’est s’appuyer sur Dieu qui s’est toujours montré fidèle.
Voici Moïse envoyé en avant, tendu entre la fidélité de Dieu hier, symbolisée par le bâton, et la promesse de Dieu pour demain. Sous le regard des anciens d’Israël, il pose un acte de foi, il offre un signe d’espérance : le Seigneur était là hier ; il a promis qu’il serait là demain ; aussi puis-je croire qu’il est là aujourd’hui.
En relisant sa vie, Moïse la relie : la présence du Seigneur est comme un fil qui vient s’enchâsser dans chaque instant de la vie humaine. Le Seigneur est là à chaque instant, et il fait de chaque vie une histoire sainte. « Aujourd’hui écouterez-vous sa parole ? », nous demande le psaume. Osons croire que le Seigneur est au milieu de nous, comme le rocher d’où jaillit l’eau vive. À propos des Israélites dans le désert, Paul écrit : « Tous, ils ont bu la même boisson spirituelle ; car ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait, et ce rocher, c’était le Christ (1Co 10,4). »
Le Christ est ce rocher d’où jaillit l’eau vive. L’Évangile met en scène une autre assoiffée, la femme de Samarie, attirée vers le Christ. Elle aussi, même si elle ne le sait pas encore, marche en avant du peuple, comme Moïse. En effet, après sa longue discussion avec le Seigneur Jésus, elle va conduire à lui le reste des gens de son village. Il y a déjà quelque chose d’une Marie Madeleine dans cette femme anonyme au passé houleux.
Le bâton avait rappelé à la mémoire de Moïse la présence et la prévenance de Dieu pour le peuple encore esclave en Egypte. De même, le Seigneur Jésus invite la femme de Samarie à une sorte de relecture de vie : « Va, appelle ton mari, et reviens. _ Je n’ai pas de mari. _ Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari : des maris, tu en a eu cinq, et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari ; là, tu dis vrai. _ Seigneur, je vois que tu es un prophète !… »
N’y voyons rien d’inquisiteur, encore moins d’accusateur ! C’est comme si le Seigneur Jésus disait à la femme : « Ton passé chaotique, je le connais. Ta douleur et tes péchés, je les connais. Je les connais car j’étais déjà là. Tu n’étais pas encore avec moi que moi j’étais déjà avec toi. Bien avant notre rencontre au bord de ce puits, je te connaissais déjà et je t’aimais. »
Appuyée sur ce passé déjà habité par le Seigneur, la femme ose porter un regard d’espérance vers l’avenir : « Je sais qu’il vient, le Messie, celui qu’on appelle Christ. Quand il viendra, c’est lui qui nous fera connaître toutes choses. »
Le pape François a placé le jubilé sous le signe de l’espérance. Sous l’élan de l’espérance, le présent, même pénible devient source de joie car il prépare un avenir certain, un peu comme le semeur se réjouit dès aujourd’hui de la moisson à venir, et le moissonneur de la moisson qui n’est pas encore engrangée.
Toutefois, il n’en va pas de notre espérance théologale comme des espoirs terrestres. En effet, « l’espérance ne déçoit pas », nous dit saint Paul aujourd’hui. L’espérance ne déçoit pas car le Seigneur ne déçoit pas. Il veut sauver. Il peut sauver. Il sauve déjà.
La croix de Jésus est notre bâton de Moïse : hier, le Seigneur a agi pour nous ; il nous a montré son amour et sa puissance. Hier, Dieu nous a aimés au point de livrer son propre Fils à la mort. Demain, il nous promet une place dans son Royaume. « Aujourd’hui écouterez-vous sa parole ? » Croirez-vous qu’il est là, présent ? Que votre vie est dès aujourd’hui une histoire sainte ? Que ce jour est une étape du chemin qui vous conduit vers Dieu ? Pour que ce jour ne soit pas une perte, crois qu’il est une perle, une perle d’un collier que relie le fil de l’espérance.
Voici ce que dit l’espoir :
« Si tu ne puises pas l’eau de la source, tu mourras. Si tu puises, tu vivras peut-être.
Si tu ne sèmes pas le grain, tu ne moissonneras ni n’engrangeras. Si tu sèmes, tu moissonneras et engrangeras peut-être. »
Mais voici ce que dit l’espérance :
« Si tu invites le Seigneur à demeurer chez toi, comme l’ont fait les Samaritains, tu peux être certain(e) qu’il demeurera.
Si tu cultives l’amitié avec le Seigneur, tu peux être certain(e) que tu moissonneras et engrangeras pour la vie éternelle.
Si tu t’approches avec foi et amour du Seigneur dans la prière et la foi, dans les sacrements du baptême, du pardon et de l’eucharistie, si tu travailles avec le Seigneur, tu peux être certain(e) que tu porteras du fruit.
Si tu mets ton espérance dans le Seigneur pour aujourd’hui et pour la vie à venir, tu peux être certain(e) qu’Il ne te décevra pas. »
Père Alexandre-Marie Valder