Une promesse plus forte que la mort

Une promesse plus forte que la mort

Une promesse plus forte que la mort

Jérusalem a peur. Les rois d’Aram et de Samarie se sont alliés pour attaquer et détrôner le jeune roi Acaz, héritier de la dynastie de David. Devant la menace, Acaz et tout son peuple frémissent et tremblent comme des arbres sous le vent (cf. Is 7,2). À ce roi apeuré est envoyé le prophète Isaïe, porteur d’une parole de confiance, d’une promesse et d’un signe : un fils va naître dans la maison du roi et, avant même qu’il soit sorti de l’enfance, les royaumes ennemis auront été vaincus. Au roi qui craignait de ne plus avoir d’avenir, le Seigneur offre un signe concret d’espérance.

Il y a de ces moments où l’avenir semble bouché, comme si le temps nous conduisait irrémédiablement dans un mur. Un siècle plus tard, c’est au tour du roi Sédécias, un lointain successeur d’Acaz, d’être paralysé par la peur. À lui aussi, le prophète Jérémie sera envoyé porteur d’un signe d’espérance. En achetant un champ alors que l’invasion est imminente (Jr 32), Jérémie affirme sa certitude que tout n’est pas fini, que cela vaut la peine de faire des projets d’avenir.

Quels pouvaient être les projets d’avenir de Joseph, le fiancé promis à Marie ? Osons les imaginer semblables à tous les jeunes couples, la tête pleine de rêves et de belles ambitions. Et soudain, c’est le drame…

Un enfant s’annonce. L’enfant d’un autre. Les projets d’avenir du jeune charpentier, sa vie avec l’élue de son cœur, tout cela s’effondre comme une maison de paille. Représentons-nous l’effarement et à l’incompréhension qui s’emparent du jeune homme, les émotions contradictoires qui le ballottent : le sentiment d’humiliation, le découragement, la colère peut-être, la honte pour lui-même, la peur pour Marie, l’angoisse de la juste décision à prendre, l’appréhension des conséquences douloureuses de cette décision…

« “Joseph, fils de David – et donc héritier d’Acaz et de Sédécias – ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint…” Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse. »

 Frères et sœurs, personne dans notre assemblée ne gouverne de royaume en péril, ni n’est fiancé à une vierge enceinte. Il n’empêche que nous sommes concernés à l’un ou l’autre moment de notre vie par la question de l’avenir bouché, du découragement et de l’« à quoi bon ». C’est alors que l’espérance nous assure que Dieu nous ouvre toujours un chemin vers notre accomplissement, vers notre vrai bonheur, vers lui-même, tout simplement.

Le chemin de l’espérance n’est pas aisé. Jamais Acaz ne fut à la tête d’un royaume fort et solide ; il lui fut seulement promis que ses ennemis ne l’emporteraient pas. Sédécias connut l’invasion de son royaume et la destruction de sa ville ; pourtant il lui fut promis que ce n’était pas la fin de tout. Jamais Joseph et Marie ne purent réaliser les projets qu’ils avaient formés ensemble ; ils furent cependant partie prenante du dessein de salut de Dieu. Dieu ne met pas fin à nos épreuves ; il nous assure seulement que nos épreuves ne nous détruiront pas.

Une fois que tous les espoirs simplement humains se sont effondrés, alors subsiste l’espérance, celle qui ne s’appuie que sur Dieu seul. Car seul Dieu peut faire une promesse plus forte que la chute des royaumes et que la mort.

 Paul, appuyé sur la certitude de la résurrection du Seigneur Jésus, a conscience de construire pour l’éternité. Ce qu’il accomplit par ses voyages, ses rencontres, ses prédications, ses lettres, tout cela construit un royaume qui n’aura pas de fin. C’est pourquoi Paul est convaincu que cela vaut la peine de tout quitter pour l’annonce de l’Évangile, pour offrir à d’autres l’espérance qui ouvre l’avenir.

J’y pensais moi-même en donnant le sacrement du pardon à des adolescents, à Taizé et à Nancy. Ce n’est pas rien d’espérer que cela vaille la peine de donner sa vie pour qu’un autre puisse entendre ces paroles qui libèrent : « Je te pardonne tes péchés ».

Voilà qui rejoint notre assemblée d’aujourd’hui, animée par l’espérance, c’est-à-dire la confiance qui fait désirer et agir.

Aujourd’hui le Christ Ressuscité, Fils de Dieu et fils de Marie, lui qui a envoyé les Apôtres et les missionnaires jusqu’à nous, est vivant et agissant dans son Église. Par la parole proclamée, par l’eucharistie célébrée, il nous rassemble en son Corps, nous vivifie par son Esprit et nous attire vers le Père. Participer à l’eucharistie de ce jour, c’est, à la suite de Paul, construire de l’éternel.

Aujourd’hui le Christ Ressuscité, la Vigne du Père, greffe Margot sur lui-même et lui donne part à sa propre Vie. La baptiser dans le Nom du Père, du Fils et de l’Esprit, c’est construire de l’éternel.

Jésus, le Seigneur-sauve ; Emmanuel, Dieu-avec-nous ; le baptême, la confirmation et l’eucharistie nous associent à lui par des liens que ni le présent, ni l’avenir, ni aucune puissance sur la terre ou au ciel, pas même la mort, ne pourront rompre. Il est en personne notre espérance. Alors n’ayons pas peur. Appuyés sur lui, nous franchirons les murs qui semblent obstruer l’avenir, et même la mort. Achevons avec les mots de Paul : « À vous qui êtes appelés à être saints – à toi, Margot – la grâce et la paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ. » Amen.

Père Alexandre-Marie Valder