Vendredi saint : se tenir au nom de tous en présence du Dieu vivant

Vendredi saint : se tenir au nom de tous en présence du Dieu vivant

 

« Voyant que Jésus était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau. Celui qui a vu rend témoignage, et son témoignage est véridique ; et celui-là sait qu’il dit vrai afin que vous aussi, vous croyiez. »

En Jésus crucifié, Dieu est à nu devant l’homme. De son cœur transpercé coulent le sang et l’eau. Dix-sept siècles plus tard, à Paray-le-Monial, c’est encore sur son cœur que Jésus attirera notre attention : « Voici ce cœur qui a tant aimé les hommes qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consumer pour leur témoigner son amour ; et pour reconnaissance je ne reçois que des ingratitudes. »

 

De la croix, son trône de gloire, Jésus parle à l’homme, cœur à cœur.

Je t’avais pétri de glaise et façonné à mon image, et me voilà si défiguré que je ne ressemble plus à un homme.

Je t’avais donné accès au fruit de l’arbre de la vie, et me voilà fixé au bois de l’arbre de la croix.

Je t’avais appelé par ton nom, mon enfant, mon bien-aimé, et me voilà muet comme la brebis devant le tondeur.

Je t’avais appelé lorsque tu t’étais caché de moi dans le jardin parce que tu étais nu, et me voilà venu jusqu’à toi, désarmé, abandonnant jusqu’à mes vêtements.

Je t’avais entendu crier sous le fouet de l’esclavage, et j’étais descendu te libérer, et me voilà attaché à la croix.

J’avais enseveli dans la mer les ennemis qui te terrifiaient, et me voilà enseveli par toi dans le tombeau.

Je t’avais révélé mon nom et fait voir ma gloire, et voilà que je t’entends dire par trois fois : « Je ne le connais pas. »

Je t’avais donné la manne et l’eau du rocher, une terre ruisselant de lait et de miel, et me voilà abreuvé de vinaigre.

Je t’avais donné ma loi de justice et de miséricorde, et me voilà condamné au mépris de toute loi.

 

Au jour de sa mort, Jésus a laissé ouvrir son cœur. Ce soir, nous allons entrer dans les sentiments de ce cœur qui a tant aimé les hommes.

Avec les mots de l’Eglise, en union avec le Seigneur, en communion avec les chrétiens du monde entier, nous allons intercéder pour tous les hommes et les femmes de notre temps sans exception ; nous allons supplier le Seigneur miséricordieux pour nos frères et sœurs chrétiens et pour ceux qui ne connaissent pas le Christ, pour les gouvernants et pour les affligés ; nous allons demander que chacun et chacune accueille toujours davantage le salut que Jésus-Christ nous offre.

Ensuite, nous irons vénérer la croix du Seigneur. Nous irons à la croix pour nous-mêmes, pour dire au Seigneur que nous l’aimons et que nous désirons ardemment sa miséricorde. Nous irons aussi à la croix en prenant sur nos épaules nos parents, nos enfants et nos proches, ceux qui sont malades ou éprouvés, ceux qui ne connaissent pas Jésus et ceux qui n’ont rien à faire de lui. Nous irons à la croix en prenant sur nos épaules nos amis et nos ennemis, les vivants et les défunts. C’est tout cela que nous apporterons au pied de la croix du Seigneur.

Au jour de notre baptême, nous avons été rendus participants de la mission sacerdotale, prophétique et royale de Jésus. C’est une belle mission que la nôtre. Cela signifie souffrir avec Jésus et comme lui de ce que les hommes s’éloignent de Dieu, et faire notre possible pour les ramener à Lui. Notre prière du Vendredi Saint tient tout entière dans ces mots qu’écrivait un moine chartreux, Dom Augustin Guillerand, il y a un peu moins d’un siècle : « Priez bien pour le pauvre monde, qui perd de plus en plus la tête, et qui va à l’abîme. Mais le Bon Dieu l’attend au fond. »

Solidaires des hommes et des femmes qui souffrent et se dessèchent loin de Dieu, nous prierons de tout cœur avec les mots que Jésus nous a enseignés. Enfin, nous recevrons la communion et nous trouverons en elle la force de veiller en silence auprès du tombeau de Jésus, en attendant le matin de la résurrection.

Alexandre-Marie, prêtre