La Parole de Dieu
Nous célébrons aujourd’hui le dimanche de la parole de Dieu. Ne nous habituons pas à ce que Dieu nous parle !
Nous chrétiens, ne sommes pas une « religion du livre », comme on le dit parfois. Au cœur de notre vie chrétienne, il n’y a pas un livre, il y a une Parole, LA Parole, la Parole incarnée : Jésus de Nazareth, le Christ, le Fils du Dieu vivant. Il est la grande lumière que le prophète Isaïe voyait se lever sur la Galilée. Il est celui que saint Paul a consacré sa vie à annoncer. Il est celui qui, aujourd’hui encore, interpelle tout homme, toute femme en lui disant : « Convertissez-vous ! Venez à ma suite ! »
Ce Jésus qui est au cœur de notre vie, nous le rencontrons uniquement par la parole et les sacrements. Il faut les deux : la parole et les sacrements.
La parole sans les sacrements court le risque de n’être qu’une vieille histoire que nous mettons en scène pour la garder vivante. Le Ressuscité ne peut pas être pour nous « le souvenir du souvenir d’autres personnes, même si elles faisaient autorité, comme par exemple les Apôtres », écrit le pape François. « La foi chrétienne est soit une rencontre avec [le Christ] vivant, soit elle n’existe pas (Desiderio desideravi n°10). »
Vous l’avez déjà remarqué : tous les dimanches à la messe, nous entendons que nous célébrons le jour où le Christ est ressuscité des morts. C’est aujourd’hui que Jésus rompt le pain et se donne lui-même en nourriture pour nous. C’est aujourd’hui qu’il meurt sur la croix et qu’il ressuscite.
La parole n’est pas une histoire d’autrefois. Chaque sacrement que nous recevons est une rencontre réelle avec Jésus-Christ vivant aujourd’hui. De même que la parole a besoin des sacrements, les sacrements ont besoin de la parole.
Sans la parole de Dieu qui les accompagne, les sacrements deviennent incompréhensibles et magiques. Voilà pourquoi nous prenons le temps de préparer ceux qui vont recevoir le baptême, la confirmation, la première confession, la première eucharistie, le mariage, l’ordre, et même l’onction des malades. Un sacrement, c’est Dieu qui se donne à l’homme, alors bien sûr il est impossible de tout comprendre. Et pourtant, il faut, autant que possible, que la personne soit disposée à recevoir ce que Dieu donne.
La parole de Dieu, nous y avons accès par la Bible lue en Église sous le souffle de l’Esprit. Nous y avons accès par ceux et celles qui, au long des siècles, l’ont commentée avec compétence et autorité. Si l’homélie dans le cadre de la messe est un service réservé aux évêques, aux prêtres et aux diacres, il y a bien des occasions pour des laïcs ou des consacrés, hommes ou femmes, de faire résonner la parole de Dieu (enseignement, catéchèse, prédication, commentaires).
Nous avons enfin accès à la parole de Dieu mise en œuvre dans la liturgie. « Le pain, le vin, l’huile, l’eau, les parfums, le feu, les cendres, la pierre, les tissus, les couleurs, le corps, les mots, les sons, les silences, les gestes, l’espace, le mouvement, l’action, l’ordre, le temps, la lumière (Desiderio desideravi n°42) » nous parlent de Dieu. Voilà pourquoi nous prêtres sommes parfois si exigeants : célébrer avec des linges ou des coupes sales, remplacer les cierges de l’autel par des lumignons, apporter son Prions en Église à l’ambon et lire la parole de Dieu à la va-vite, ce sont comme des fautes de grammaire lorsque nous essayons de dire Dieu.
Au contraire, lorsque nous nous laissons conduire par la main, nous entrons dans l’émerveillement : le Créateur du ciel et de la terre me connaît, il me parle, il m’aime ; aujourd’hui, toute personne est appelée à être baptisée, plongée dans la mort et la résurrection, non pas au nom du pape François, de Mgr Papin ou du P. Alexandre-Marie, mais de Jésus vivant ; aujourd’hui encore, Jésus désire d’un grand désir que toute personne puisse communier à l’Eucharistie.
Je sais bien que ce n’est pas facile d’oser « s’attaquer » à la Bible. On a peur de ne rien comprendre ou de comprendre de travers, on ne sait pas comment faire. N’ayez pas peur ! Faites confiance à la parole : elle a nourri des générations de chrétiens sur les cinq continents. Faites confiance à l’Esprit-Saint qui a inspiré cette parole et qui nous aide à la comprendre aujourd’hui.
Nous lisions un jour avec des adolescents ce passage de l’Évangile de Matthieu où Jésus doit se rendre chez un centurion pour guérir son serviteur. « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri. » Alors l’un des jeunes demande : « Oh, mais ça n’aurait pas un rapport avec la phrase qu’on dit à la messe ? » Un exemple parmi tant d’autres.
En conclusion, je vous propose une méthode en quatre temps pour prier avec un texte biblique, l’évangile d’aujourd’hui par exemple.
Premièrement faire silence, demander au Seigneur son Esprit-Saint pour que ce texte devienne parole de Dieu pour moi aujourd’hui, et lire et relire lentement le texte, mentalement ou à haute voix. On peut même le recopier. Lire attentivement, c’est déjà une prière.
Deuxièmement, toujours dans la prière, chercher à comprendre, par exemple en se laissant conduire par les images. Il est question d’une lumière qui se lève dans les ténèbres. Tandis que je l’imagine, je lis et j’entends la voix de Jésus : « Convertissez-vous – c’est-à-dire “Tournez-vous de ce côté” – car le royaume des Cieux est tout proche. » Où ça ? Où ça ? Et Jésus sait bien que nos esprits obscurcis ne peuvent pas tout comprendre, alors il vient lui-même à la rencontre de ceux qu’il appelle : « Venez à ma suite ! » Toujours dans ce deuxième temps, demandons-nous ce que cette parole me dit de Dieu, ce qu’elle me promet, ce qu’elle exige de moi.
Troisièmement, exprimons une courte prière : « Me voici, Seigneur ! », « Merci pour ta lumière ! », « Que veux-tu que je fasse ? ». Revenons au texte, remercions, demandons, et puis, quatrièmement, faisons silence et laissons la parole descendre et travailler notre être.
Père Alexandre-Marie Valder