Rien ne pourra nous séparer de Lui
Frères et sœurs, le carême est avant tout un chemin de préparation à Pâques. Dans la nuit de Pâques, les catéchumènes seront baptisés et les fidèles déjà baptisés renouvelleront les promesses de leur baptême : nous rejetterons le péché, le mal et Satan qui en est l’auteur, nous professerons notre foi en Dieu Père, Fils et Esprit Saint, nous recevrons l’aspersion d’eau baptismale.
« En ces jours-là, avons-nous entendu, Dieu mit Abraham à l’épreuve. » La semaine dernière, nous avons accompagné le Seigneur Jésus au désert, tenté par Satan. Lorsque Satan tente une personne, c’est dans le but de la faire tomber, c’est afin de l’enfoncer dans sa condition de faiblesse et de péché.
Il n’en est pas ainsi pour Dieu. Lorsque Dieu met à l’épreuve, c’est toujours afin que la personne en sorte victorieuse, afin que l’épreuve révèle sa force et sa foi. C’est bien ce qui s’est passé avec Abraham.
Abraham, ainsi que les juifs qui ont raconté son histoire des siècles après, voyaient autour d’eux les faux dieux assoiffés de sang humain. Le dieu le plus grand était celui qui pouvait réclamer les plus grands sacrifices. Aujourd’hui encore, ici et ailleurs, les hommes continuent d’abreuver les idoles du sang des innocents.
Abraham au contraire avait reçu du Seigneur, le Dieu unique, le seul Dieu, une promesse de vie : promesse d’une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord des mers, promesse d’être béni et de devenir lui-même une bénédiction pour les autres. Le vrai Dieu ne réclame pas la mort ; il donne la vie en surabondance. Abraham en était convaincu : même la mort n’est pas un obstacle pour Dieu, même la mort ne peut l’empêcher d’accomplir sa promesse.
En effet, ce jour-là, sur la montagne de Moriah, Dieu n’a pas voulu de la vie du fils unique bien-aimé d’Abraham. Car Dieu, notre Dieu, le seul vrai Dieu, n’est pas ainsi. Alors, qui donc est Dieu ? Qui est-il, celui en qui nous allons très bientôt renouveler notre profession de foi dans la nuit de Pâques, et même dans quelques minutes ?
Réentendons ensemble les mots de Paul : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous. Dieu est celui qui rend juste : alors, qui pourra condamner ? » et, si vous allez voir la suite du texte dans vos bibles, vous lirez ces paroles de feu de l’Apôtre : « J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, […] rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. »
Frères et sœurs, Dieu est pour nous. Toujours. Dieu est Père et il poursuit tout homme, toute femme, de son amour. Inlassablement. Le fils unique bien-aimé qu’il ne demandait pas à Abraham, il l’a sacrifié pour nous. Nous le croyons.
Je lisais récemment l’histoire d’une jeune femme. Toute son enfance, ses parents l’ont appelée leur fille préférée, alors qu’elle n’avait pas de sœur. Un jour, dans sa prière, monte en elle une voix : « Tu es ma préférée. » Elle se raisonne : que Dieu l’aime, pourquoi pas, mais qu’elle soit sa préférée, c’est impossible ! La voix monte à nouveau en elle : « Je t’ai préférée à mon Fils. » Est-il utile de vous dire que cette parole vaut pour chacun ici ?
Frères et sœurs, dans la nuit de Pâques, après avoir rejeté le péché, le mal et Satan, après avoir professé notre foi en Dieu le Père qui livre son Fils et justifie par l’Esprit, nous serons aspergés d’eau en mémoire de notre baptême.
L’eau, c’est la mort, le domaine du mal, le lieu du chaos. Au commencement du monde, Dieu a dompté les eaux et il y a fait foisonner la vie. À travers les eaux de la mer rouge, Dieu a fait passer Moïse et le peuple vers la liberté. À travers les eaux du Jourdain, Dieu a fait passer Elie vers le ciel. Les eaux du Jourdain ont recouvert le Seigneur Jésus à son baptême, et il les a sanctifiées. Sur les eaux de la mer de Galilée, il a marché sans être englouti par elles.
La mort, la mort corporelle, le Seigneur Jésus l’a affrontée. Il est mort, il a été enseveli et il est descendu aux enfers. C’est ce dont il s’entretenait avec Moïse et Elie ; c’est ce qu’il avait annoncé à ses apôtres. Ce que la transfiguration annonce déjà, ce que Pierre, Jacques et Jean ne comprennent pas encore, c’est que Jésus est le Dieu vivant et que ni la mort, ni le mal, ni le chaos, ni les puissances infernales ne sont des obstacles pour Dieu, que rien ne l’empêchera d’accomplir sa promesse.
Le jour de notre baptême, nous avons été mis en contact avec la mort ; elle a ruisselé sur nous, nous y avons été plongés, mais elle n’a pas pu nous nuire. Chaque fois que nous nous signons avec l’eau bénite, chaque fois que nous recevons cette aspersion, y compris l’ultime aspersion de nos obsèques, c’est toujours la même certitude : ni les épreuves de la vie, ni la maladie, ni même la mort ne peuvent me nuire car, pour qui a renoncé à Satan et qui s’est attaché au Dieu unique, le Père du Seigneur Jésus, même la mort du corps n’est pas un obstacle à la promesse.
Frères et sœurs, il y a tout cela dans le baptême que nous allons recevoir ou rénover dans la nuit de Pâques. Tout sacrement est un cri de foi en la force de Dieu au cœur d’un monde secoué par le mal.
L’onction des malades célébrée en l’église de Neuves-Maisons il y a deux semaines, crie que Dieu n’est pas absent de la vie des souffrants mais se penche préférentiellement sur eux. Le sacrement du pardon que nous allons recevoir au cours de ce carême crie la victoire toujours nouvelle du oui de Dieu à l’homme, plus fort que les non de l’homme à Dieu. Le sacrement de l’eucharistie que nous célébrons aujourd’hui crie que Dieu continue à rassembler son peuple, à se rendre présent au milieu de lui, à lui donner sa vie et à l’envoyer sans peur dans le monde.
« J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. »
Alexandre-Marie Valder, prêtre