« le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »

« le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »

Qu’est-ce qu’un fossile, un fossile de dinosaure par exemple ? Cela ressemble à un squelette, mais en fait ce squelette s’est minéralisé au cours des années. De l’extérieur, on dirait des os, mais en fait c’est du caillou.

L’évangile de ce dimanche nous parle d’un homme fossilisé. On croit que c’est un juge, mais il est dépourvu de justice. Un juge dépourvu de justice est-il encore un juge ? Peut-être que, – on peut l’imaginer – plusieurs années auparavant, c’était un jeune juge plein d’ardeur à redresser les torts. Et voilà qu’il est devenu un juge fossile, qui ne fait plus ce pour quoi il est fait : rendre la justice en tenant compte de Dieu et des hommes.

D’une part, Jésus nous rassure : Dieu n’est pas semblable à ce juge, il est toujours à l’écoute de celui qui crie vers lui ; d’autre part, Jésus nous interroge sans compromis : « le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »

Chaque année à Pâques, nous renouvelons les promesses de notre baptême, et chaque dimanche notre profession de foi. L’occasion de faire un bilan : où en suis-je avec Jésus ? est-ce que, lorsqu’il viendra, il trouvera la foi dans mon cœur ? ou bien suis-je devenu un chrétien fossile : de l’extérieur, on dirait du chrétien, mais en fait c’est du caillou ?

Les lectures de ce dimanche nous proposent deux modèles pour nous encourager à la fidélité et relancer notre élan : Moïse et Timothée.

Moïse avait conduit le peuple d’Israël hors de l’Egypte, la terre d’esclavage. Le peuple d’Israël marchait dans le désert, avec Dieu, en direction de la Terre Promise, lorsque Amalec, un peuple ennemi, vint lui barrer la route et le combattre.

Cela, c’est l’image de notre vie chrétienne : dès maintenant, nous marchons avec Dieu et il nous faut faire face aux forces qui s’interposent entre nous et le Ciel, notre terre promise. Ces forces, ce sont les démons qui cherchent à nous détourner du bon chemin, ce sont les petites et grandes méchancetés des hommes, auxquelles il est bien difficile de répondre par la patience et la douceur, ce sont aussi et d’abord nos propres péchés, le mal que nous commettons.

Il y a de l’adversité, oui, mais allons-nous donc renoncer à marcher vers le Ciel avec Dieu à cause d’elle ? Non ! Nous avons le choix de ne pas baisser les bras, de tenir bon avec le Seigneur. Selon l’exemple de Moïse, rappelons-nous que le Seigneur combat avec nous et pour nous et que nous sommes certains de l’emporter si nous ne baissons pas les bras.

Oui, le Seigneur aurait pu vaincre Amalec seul sans qu’Israël eût besoin de combattre, sans que Moïse eût à tenir les bras levés en prière, toutefois le Seigneur a préféré que ses amis prennent part à la lutte et à la victoire.

Oui, le Seigneur aurait pu faire que la bataille ne durât qu’une heure, toutefois il a préféré éprouver la fidélité et la ténacité, la foi et l’amour de Moïse.

Oui, le Seigneur aurait pu faire que Moïse ne se fatiguât pas, toutefois il a préféré lui donner et la force de tenir dans la fatigue et des compagnons pour le soutenir.

Bien qu’il ait vécu il y a des milliers d’années, Moïse reste pour nous un modèle de foi, un remède à la fossilisation de notre vie avec Dieu. En dépit de son âge avancé, Moïse resta jeune dans la foi. Grâce à sa foi, il voyait plus clair que bien des jeunes gens et, par la charité, il continuait de lutter pour le bien. L’Écriture dit simplement ceci : « Moïse avait cent vingt ans quand il mourut ; sa vue n’avait pas baissé, sa vitalité n’avait pas diminué. » (Dt 34, 7)

L’Écriture, justement, c’est elle qui est le secret de la fidélité de Timothée, notre deuxième témoin. « Depuis ton plus jeune âge, lui écrit Paul, son ami et son maître, tu connais les Saintes Écritures : elles ont le pouvoir de te communiquer la sagesse, en vue du salut par la foi que nous avons en Jésus Christ. »

La Bible nous donne accès à la parole de Dieu, une parole vivante et qui donne la vie. Connaître la Bible, lire la Bible, méditer la Bible pour un chrétien aujourd’hui, ce n’est pas obligatoire, c’est tout simplement vital. La prière en communauté, la messe, la confession, c’est de la plus haute importance, mais tu ne peux pas toujours y participer. La Bible, elle, est toujours à ta portée, si tu veux prendre les moyens de la connaître.

Fréquenter l’Écriture Sainte, cela change la vie. Voici ce que Paul écrit à Timothée : « Toute l’Écriture est inspirée par Dieu ; elle est utile pour enseigner, dénoncer le mal, redresser, éduquer dans la justice ; grâce à elle, l’homme de Dieu sera accompli, équipé pour faire toute sorte de bien. » Timothée était le chef d’une communauté chrétienne, voilà pourquoi Paul lui conseille de s’appuyer sur la Bible pour enseigner les autres. Avec les mots de Paul, je dis à chacun ici, à moi en premier lieu : « L’Ecriture est utile pour t’enseigner toi-même, dénoncer le mal en toi-même, te redresser toi-même, t’éduquer toi-même dans la justice. »

Aux plus jeunes, je vous l’avoue bien volontiers : à votre âge, je ne lisais pas beaucoup la Bible. C’est pour cela que je suis bien placé pour vous dire de ne pas faire comme moi. Ayez une Bible, lisez-la chaque jour, explorez-la, découvrez-en les secrets et les richesses. Et les plus anciens, ne soyez pas des habitués de l’Écriture. A tous, préparez et méditez les textes qui seront lus à la messe et, lorsque vous lisez à l’ambon, ayez conscience de faire résonner la parole de Dieu pour les frères et sœurs.

Aujourd’hui, Jésus employait l’image d’un juge dépourvu de justice. Dans d’autres passages, il parle du sel sans saveur et de la lampe qui n’éclaire pas. Toujours il nous demande de ne pas être des chrétiens sans foi. Comme Moïse, tenons fermement la prière qui nous donnera la force dans les petites et les grandes épreuves du quotidien. Comme Timothée, soyons des assoiffés des Écritures Saintes où nous trouverons la sagesse.

Que le Seigneur fasse grandir notre foi afin qu’il nous trouve prêts et vigilants lorsqu’il reviendra. Amen.

Père Alexandre Marie Valder