Ses compagnes lui font cortège vers le palais du roi

Ses compagnes lui font cortège vers le palais du roi

Frères et sœurs, la Sainte Vierge Marie ne nous est pas donnée pour que nous la mettions sous vitrine, comme une petite chose précieuse et fragile que l’on regarde de loin sans s’en approcher.

Les textes de la fête d’aujourd’hui sont tous pleins de mouvement : une Femme qui apparaît dans le ciel, qui enfante, qui est pourchassée et qui s’enfuit ; une princesse conduite en cortège parmi les chants de fête ; une jeune fille qui se met en route avec empressement, un enfant qui tressaille dans le sein de sa mère, une femme enceinte qui bénit d’une voix forte, et Marie qui chante à pleine voix son cantique d’action de grâce.

Notre Dieu est un Dieu vivant, un Dieu agissant, un Dieu qui vit et qui met en mouvement ceux qu’il touche. Marie, totalement docile au souffle de l’Esprit, se met en route et se rend avec empressement auprès d’Elisabeth. L’un des effets de nos péchés est de nous figer, de nous entraver, de ralentir ou même d’interrompre notre marche vers Dieu. Rien de tel en Marie.

Frères et sœurs, je voudrais nous inviter à méditer à partir d’une parole du psaume qui dit, à propos de la fille du roi : « Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège ; on les conduit parmi les chants de fête : elles entrent au palais du roi. »

En cette fête de l’Assomption, nous faisons cortège à Marie, notre Mère, notre Reine. Nous marchons avec elle, nous l’accompagnons, nous nous réglons sur son pas, nous allons dans la même direction qu’elle. Marie, la Mère de Dieu, est cette femme Comblée-de-grâce. En elle, aucun péché, aucun refus, rien qui résiste à la voix de Dieu. La suivre, c’est prendre le chemin le plus court vers le Seigneur Jésus.

Faire cortège à Marie n’est pas de tout repos. L’Évangile nous dit que Marie se met en route avec empressement pour se rendre auprès de sa cousine Elisabeth. Faire cortège à Marie, c’est aller là où elle va, là où le Seigneur l’appelle. À travers Marie, c’est Dieu lui-même qui nous met en mouvement pour nous attirer à lui.

Je reviens à la parole du psaume : « Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège. » Si nous pouvons faire cortège à Marie, si nous marchons avec elle, c’est parce qu’elle est venue jusqu’à nous. Chacun et chacune peut reprendre l’exclamation étonnée d’Elisabeth : « D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? »

Marie vient chez nous, elle se fait notre compagne, notre toute proche. Immaculée, conçue sans péché, elle n’est pas séparée de nous, bien au contraire : ce sont nos péchés, nos colères, nos jalousies, nos rivalités, nos égoïsmes, qui nous séparent les uns des autres. Immaculée, conçue sans péché, Marie épouse pleinement ce que nous sommes, ce que nous vivons, pour nous conduire vers son Fils.

Nombre d’entre nous ici avons la belle habitude de méditer les mystères du rosaire. En priant le chapelet, nous parcourons inlassablement la vie de Jésus en tenant la main de Marie. Nous laissons Marie nous raconter Jésus. Nous laissons Marie former Jésus en nous.

Le 11 février 1858, Bernadette, lors de sa première rencontre avec Marie, essaie de faire le signe de la croix sans y parvenir. Ce n’est que lorsque Marie fait le signe de la croix que Bernadette parvient à le faire à son tour, comme pour nous dire que nous avons besoin que Marie nous enseigne comment prier, comment parler à Jésus, comment parler de Jésus, comment vivre avec Jésus.

À travers Marie, c’est Dieu lui-même qui, avec beaucoup de pédagogie, nous apprend à devenir ses fils et ses filles.

Je reviens une dernière fois à la parole du psaume : « Des jeunes filles, ses compagnes, lui font cortège ; on les conduit parmi les chants de fête : elles entrent au palais du roi. »

Marie invite toute personne à devenir sa compagne, à devenir, avec elle, disciple de Jésus. Marie invite toute personne à l’accompagner, à lui faire cortège jusqu’au palais du roi, c’est-à-dire le Ciel. Frères et sœurs,  à votre avis, est-ce pour que nous restions à la porte du palais ? Non, bien sûr que non.

La fête de l’Assomption nous permet de célébrer cette merveille : Marie, une fille d’Israël, une femme comme nous, est accueillie dans le ciel avec son âme et son corps. Le corps qui a engendré le Verbe fait chair, le corps qui s’est hâté sur les routes de Galilée, le corps qui a soigné Jésus, le corps qui a peiné derrière lui sur le chemin du Golgotha, le corps avec lequel Marie a servi, souffert et aimé, ce corps n’a pas connu la corruption du tombeau et il est désormais en Dieu.

À la fin de notre vie, contrairement à Marie, notre corps connaîtra la corruption du tombeau. Toutefois, ce qui est déjà advenu pour la Vierge Marie, c’est ce qui est promis à ses compagnes qui lui font cortège parmi les chants de fête : demeurer un jour dans le palais du roi avec notre personne tout entière, âme et corps.

Le corps que nous avons reçu de nos parents, ce corps avec lequel nous aurons servi et aimé, ce corps qui en aura vu de dures, ce corps qui aura peut-être engendré des enfants, ces mains qui auront caressé des joues, ces bras qui auront enserré des épaules, ces yeux qui auront versé des larmes, ces bouches qui auront chanté et souri, ces genoux qui se seront pliés pour adorer Dieu ou pour s’approcher d’un petit enfant, bref ! ce corps que nous sommes, nous le retrouverons, transformé, transfiguré, éternisé. Nous pourrons alors, pleinement humains, âme et corps, célébrer ensemble, avec Marie et tous les saints, et chanter : « Le Puissant fit pour moi des merveilles : saint est son Nom ! » Amen.

Père Alexandre-Marie Valder